Rencontre nocturne. Désolé pour la qualité photo.
Chris
C est pas la 1ere fois que te le croises celui la,non?
Y’en a plein, ils mangent surtout les écrevisses de californie.
Raton laveur, souvenir des bases américaines avant leur départ en 1966 qui mange des écrevisses de Californie une certaine normalité en fait…
Oui une espèce envahissante qui en régule une autre !
"Qui es-tu ? Et que cherches-tu ?
Je suis un chevalier, qui cherche ce que je ne peux trouver. J’ai beaucoup cherché, et je n’ai rien trouvé.
Et que voudrais-tu trouver ?
L’aventure."
Chrétien de Troyes, Yvain ou le Chevalier au Lion, 1170
Cela faisait longtemps que je ne m’étais pas levé à 4 heures du matin pour partir à la pêche.
A l’aventure, plutôt. Quelle épopée que cette journée…
Une arrivée à l’aube au bord de l’eau, un poisson immédiatement entrevu qui tape sur le fond et nous montre, l’espace d’un instant, sa nageoire caudale qui fend l’eau comme une salutation, avant de disparaître irrémédiablement - nous n’étions pas prêts encore, les cannes étaient en train d’être montées. Puis plus rien, pendant des kilomètres de rivière remontée méthodiquement et difficilement, à l’affût du moindre poste et du moindre signe. Talus, blocs, bosquets enchevêtrés n’arrêteront pas notre quête. Mais les eaux sont très basses, plus que lors de mes derniers passages ici - et pas un poisson n’est visible, même en insistant sur les postes les plus marqués. Nous ferons neuf heures de pêche dans le vide. Dans le vide ? pas tout à fait : un faon qui explose dans les herbes hautes à deux mètres, nous faisant une peur bleue avant de traverser merveilleusement la rivière en trois bonds, trois écureuils jouant vertigineusement sur la paroi rocheuse, un joyau de nid de canne colvert découvert dans l’herbe avec ses huit oeufs parfaitement disposés, et tant de paysages et de perspectives à vous couper le souffle. Si nous sommes venus ici, c’est également pour ça.
Le vide, donc, jusqu’à ce poste où nous capturerons coup sur coup, en sèche-nymphe, trois poissons certes modestes, mais qui nous redonneront du coeur à l’ouvrage, nous indiquant que quelque chose est peut-être en train - ne serait-ce qu’un peu - de bouger. Et voilà que cinq-cents mètres plus haut, c’est enfin le grand moment, celui qu’on attend et qu’on espère au creux de sa patience : une grosse barre couleur sable immobile dans un fort courant devant un bloc immergé.
J’aurai le temps de crier : « Je l’ai », puis « C’est très gros », avant qu’elle ne fasse - inarrêtable - le tour de son bloc par l’arrière, cassant net ma ligne et nous laissant éberlués, K.-O. Nous y étions - c’était là, à deux doigts, après des heures d’insistance - et c’était déjà fini…
« Je suis un chevalier qui cherche ce que je ne peux trouver. »
Mais la quête n’est pas terminée : il reste encore deux heures pleines de pêche avant de devoir redescendre la rivière pour éviter un retour difficile, voire dangereux, dans l’obscurité. Nous continuons, remontons encore un coude de rivière, puis un autre, un autre encore, hésitons - est-ce que ça vaut la peine de poursuivre ? faut-il rebrousser chemin ? - et nous remontons encore, et encore, plus que de raison. C’est que j’ai un poste en tête. C’est que depuis le départ, une voix, insistante et discrète, m’appelle.
"Et que voudrais-tu trouver ?
L’aventure."
Cette voix, ou cette image, c’est un poste qui m’a toujours paru terriblement prometteur, mais qui s’est à chaque fois révélé impêchable à cause d’un courant bien trop fort, retors et profond. Avec ces eaux inhabituellement basses, j’ai la sensation intime que c’est l’occasion ou jamais, et il faut que j’en aie le coeur net.
L’aventure, c’est ce qui - à rebours de toute loi consumériste ou marchande - advient, et que vous ne pouvez exiger.
Elle m’aura été pourtant offerte précisément sur ce poste pressenti, comme dans un rêve, à l’extrême bout de cette quête folle, dont le scénario, quand j’y repense à quatre jours d’intervalle, me paraît invraisemblablement parfait. Les difficultés, le vide irrémédiable sur une dizaine de kilomètres, la fatigue physique et psychique, le gros poisson perdu qui aurait pu nous mettre à terre, la tentation du découragement, puis soudain la merveille, l’extraordinaire merveille, tout au bout du chemin.
Un poisson d’une beauté et d’une puissance époustouflante, qui m’aura fait dévaler 70 mètres de rivière dans une course inflexible, tonitruante, et qui se sera rendu quelques secondes seulement dans l’épuisette - émerveillement -, avant de nous fausser compagnie d’un coup de queue aussi irrésistible qu’inattendu, nous laissant les bras ballants, avec uniquement trois clichés trop rapides dans la besace, qui ne rendront jamais compte de sa majesté ni de son épaisseur hors normes. Resteront, pour nous, les souvenirs.
Merci à toi, esprit des lieux.
Merci Mauro,
Je vais me coucher sur cette magnifique épopée si bien racontée; des rêves plein la tête
au plaisir,
Bravo et merci @Orpailleur pour ce récit et la photo de ce magnifique poisson !
Un " j’aime " faute de mieux, je viens au réveil de te lire et me voilà remonté comme une pendule !
Pour moi, il va falloir attendre demain pour retourner à l’eau, j’espère faire " le coup du soir " avec des jeunes, j’ai hâte de voir ce que cela va donner.
Bien cordialement,
Superbe récit et poisson, merci pour ce moment d’évasion. La prochaine faudra changer d’épuisette
Belles émergences d’oligoneurhielles en perspective.
Fred
… des infidélités à l’Helvétie
Du tout ! Qu’est-ce qui t’y fait penser ?
Truite 100% helvético-suisse, toujours sur mes eaux locales, d’ailleurs encore plus près que d’habitude vu le temps de pêche très limité cette année.