La danse des Dames du lac

Waou :star_struck:.
C’est des mycoses sur ce gros male?

Oui, mycoses typiques d’après le frai.
Tous les poissons ne sont pas touchés.
Certaines s’en remettront, d’autres pas.

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Avec plus d’un mois de retard, sur la grande rivière, la crue est enfin arrivée. Leur ponctualité me laissera toujours bouche bée.

Sur un petit tributaire au débit moins violent, il aura tout de même fallu quelques heures de traque pour réussir à localiser une de ces merveilles si farouches au moment d’entrer dans ce royaume étranger qu’est la rivière ou le ruisseau, elles qui hantent toute l’année les profondeurs du grand lac. J’ai eu ensuite - expérience inoubliable - le privilège de suivre ce poisson de 80 cm passés durant plus d’une heure (et ce n’était qu’une minime partie de son périple), sur 500 mètres d’une remontée extraordinaire à travers rapides, cascadelles, fosses, et - le plus spectaculaire - quelques radiers où le niveau ne dépassait pas les 10 cm, obligeant les poissons à se mettre à découvert dans des accélérations fulgurantes qui vous soulèvent la rivière.
La détermination de ces géants à remonter les courants pour gagner leurs frayères est époustouflante : elle relève à chaque fois de l’exploit. Elles franchiront l’infranchissable coûte que coûte (trois poissons morts sur le trajet). C’est au-delà de l’extraordinaire : ça vous coupe le souffle et leur donne une dimension qui confine au sacré.

Soudain, une apparition :

Un poisson sublime, puissant, parfaitement profilé, le front encore couvert de sangsues lacustres comme d’un diadème.

Son dos brillant et puissant perce le courant, dessinant à chaque mouvement de splendides arabesques dans son sillage.

Par moments, le poisson se retrouve presque à sec, louvoyant dans l’eau comme un serpent, avant de trouver appui dans le courant pour une accélération à vous couper le souffle, qui projette des éclaboussures sur plusieurs mètres dans un bruit impressionnant.

La robe est celle d’un fauve.

Et voilà que, ayant trouvé un poste plus profond, le poisson se repose, se figeant comme pour reprendre souffle. Puis lentement, il tourne sur lui-même, semble un instant étudier et repérer le courant, avant de reprendre, inarrêtable, sa prodigieuse ascension.

Quelle puissance.

Longue vie à toi, esprit de l’eau.

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Magnifique…
Merci ! :slight_smile:

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Sublime, de très belles photos, Merci @Orpailleur pour ces belles scènes !! :blush: :blush:

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magnifique bis
des images comme on aimerait en voir plus souvent !
:slightly_smiling_face:

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C’est tout simplement Beau !

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Sublime !!! :heart_eyes::heart_eyes::heart_eyes:

merci pour ce partage

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Merci beaucoup, c’est sublime !

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superbe photo et récit !

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Et une année de plus au compteur des remontées.

Cinq sorties à vide à les chercher, et pourtant il y avait de l’eau au bon moment, pour une fois.
C’est que leurs passages sont si furtifs et rapides, qu’on a vite fait de passer à côté, ou de ne pas être dans le bon créneau. Et puis soudain, c’est là, devant soi - une apparition à chaque fois, véritable épiphanie.
Quelque chose à bougé, là-bas… ne serait-ce pas le sillage d’un dos épais qu’on devine derrière cette branche ? Mon dieu, ça bouge ! C’en est bien une.
Cette apparition tonitruante, brusque, au caractère profondément sauvage, d’une présence massive, nerveuse, puissante, fraîchement sortie d’un autre monde… Que ce doit être étrange de passer du fond obscur d’un grand lac à ces eaux soudain courantes, exiguës, lumineuses, et par endroits si dangereusement transparentes et basses pour un poisson de ce calibre.

Une fois qu’on en a une, ou deux - car elles montent souvent par couples déjà formés - en ligne de mire, il faut les suivre et ne surtout pas les perdre de vue dans les rapides où elles deviendront pratiquement invisibles - et c’est tout juste une ombre qui vous guide, qu’on croit deviner sous les reflets et l’écume, ou un bruit sourd et sec qu’on croit entendre au milieu du tumulte des rapides quand l’une d’entre elles passe subitement un seuil. On les poursuit à l’aveugle, à l’instinct, à la folie, sautant à la hâte d’un talus à l’autre, passant à toute vitesse entre les broussailles épaisses pour tenter de suivre le rythme de l’inlassable remontée, et espérer pouvoir capturer enfin, au détour d’une gravière où la rivière, l’espace d’un instant, sera basse et claire, le passage des seigneurs du lac.

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