L’ombre commun est en expansion en France. Rien que sur le bassin Seine Normandie, en moins de 30 ans, la colonisation est maintenant presque complète sur les affluents amonts, et en Normandie crayeuse, l’espèce est plein expansion. On prends désormais a la ligne autant ou davantage d’ombre que de truites sur ces rivières. Or sur la plupart de ces rivières, c’est clairement la truite qui régresse. La raison est relativement simple, l’ombre commun est moins sensible au colmatage/concretionnement des frayères, ce qui lui donne un gros avantage en zone de plaine où l’agriculture intensive et l’usage irraisonné des sols est LE problème principal.
Sur la Dordogne aval, même si il est délicat de faire des estimations quantitatives, je pense qu’il y a désormais clairement plus d’ombre que de truite, et ce malgré une thermie estivale qui sur le papier est hyper-défavorable ! Il est incroyable d’y voir autant de juvéniles alors que les juvéniles de truites sont beaucoup plus rare voire absent. A ce niveau typologique (zone a barbeau mediane et inférieure), il ne devrait pas y avoir de recrutement quantitativement aussi abondant, celà ne colle en rien avec ce qui est connu sur l’écologie de l’ombre. Et pourtant. Je n’ai pas d’explication, le seul truc que je vois c’est l’existence de souches particulièrement résilientes et rustiques par opposition aux souches natives
Je vais me répéter mais tant pis le sujet est très intéressant :
Dans le bassin de la Seine comme de la Dordogne, cette espèce a été introduite…
Donc, on peut adorer ces rivières et ses ombres, mais ce sont des populations artificielles, qui comme je le disais précédemment risque d’être la solution pour maintenir l’ombre sous nos contrées
Sur ses BV naturel, c’est-à-dire le Rhin et le Rhône, à part des introduction locales la plupart des populations ne sont absolument pas en expansion, bien au contraire. Les évaluations faites régulièrement, et les pêches d’inventaire et de suivi de ces populations, démontrent qu’elle sont toutes en régression, au mieux en stagnation pour certaines, ou pour beaucoup déjà disparues…
Tiens tant qu’on y est, je suis preneur des références “Persat” et “Northocte” que tu cites. Parceque ce que je trouve sur Persat c’est de la modélisation a partir de courbe de croissance, et Northcote c’est sur l’ombre arctique, mais j’ai peut etre zappé des trucs. Merci.
Je croise certaines de vos analyses avec ma propre expérience et j’ai tendance à penser qu’effectivement, s’avère pertinente la conclusion selon laquelle l’ombre serait enclin à se regrouper dans des zones d’eau plus fraiche. En effet, sur la rivière dont j’ai parlé en lançant le fil, les secteurs qui restent bien peuplés sont soit des confluences avec un affluent classé en 1ére catégorie, soit des courants bordés de fosses, soit encore des calmes très profonds et dont les berges sont boisées. Dans ces secteurs, l’ombre reste présent voire augmente ses populations alors qu’ailleurs c’est plutôt désert, ce qui tend à accréditer cette thèse.
Oh non, Henri a fait bien plus que ça (et travaille dessus encore, sur les populations de l’Allier entre autres). Il a beaucoup travaillé sur la population de la rivière d’Ain avec JP Mallet, mais il a aussi écrit des articles qui sont considérés comme le fondement de l’écologie de l’ombre commun en France au début de sa carrière.
Je te retrouve ça et t’envoie les références, voire les articles si je les ai en PDF !
Si tu veux, envoie-moi une adresse e-mail par MP où te les transmettre
Northcote, T. 1995. Comparative biology and management of Arctic and European grayling (Salmonidae, Thymallus). Reviews in Fish Biology and Fisheries, 5: 141-194.
Persat, H. 1977. Ecologie de l’Ombre commun. Bulletin Français de la Pêche et de la Pisciculture, 266 : 11-20.
Persat, H. 1988. De la biologie des populations de l’ombre commun Thymallus thymallus (L. 1758) à la dynamique des communautés dans un hydrosystème fluvial aménagé, le Haut-Rhône français. Eléments pour un changement d’échelles. Thèse de doctorat d’Etat. Université Claude Bernard Lyon I.
Persat, H. 1996. Threatened populations and conservation of the European grayling Thymallus thymallus (L., 1758). In Conservation of Endangered Freshwater Fish in Europe. Edited by A. Kirchhofer and D. Hefti. Birkhäuser Verlag, Basel: pp. 233-247.
Wedekind, C. and Küng, C. 2010. Shift of spawning season and effects of climate warming on developmental stages of a grayling (Salmonidae). Conservation Biology, 24(5): 1418-1423.
Salut,
Mercredi la température de l’eau sur la dordogne dans le Périgord noir était à 28°C avec malheureusement deux truites de mortes. Je pense que ce n’est que le début hélas, pas encore eu d’éco d’ombres mort
La Dordogne était très basse hier soir sur le secteur de Pinsac et l’eau chaude. Quelques belles truites dans les bordures qui tapaient dans des petits alevins et d’autre qui gobaient quelques éphémères contrairement aux ombres.
En espérant que les températures baisse un peu la semaine prochaine!
Une mesure qui implique des comparaisons de lieux et de temps …
A ce sujet existe-t-il comme pour la température de l’air un protocole de mesures qui permettrait de rationaliser ces constatations ?
Car l’on suppose qu’entre la surface, fond, calmes, courants, ça varie pas mal … Reste aussi à avoir un instrument de mesure fiable, ce qui n’est pas le cas des basiques thermomètres à alcool à la mesure volatile.
Oui il existe un grand nombre de protocole différents, en fonction du type de rivière, de l’écoulement et de sa profondeur. Généralement on utilise des loggers de températures, qui sont calibrés avant et après en les mettant tous dans le même milieu de contrôle.
Et on utilise de plus en plus (sur les zones peu profondes) des capteurs/caméras thermiques sur des drones/hélicoptères pour détecter les points de résurgence plus froids.
Et bien entendu il faut du matériel précis (et donc cher généralement)… En fonction du thermomètre, la marge d’erreur peut être aussi grandes que les variations transversales et longitudinales de la rivière
A 28°C on est clairement dans la zone de stress voire létale…
Il peut y avoir adaptations locales sur certaines populations si elles rencontrent des hautes températures régulièrement (sélection des individus résistants en fait), mais si des poissons sont déjà observés morts, combien l’ont été et ont été emportés donc pas vus ?
Après, certains individus arrivent toujours à trouver des zones froides / refuges thermiques… En tout cas on peut l’espérer…
Mais la météo à venir n’annonce pas d’accalmie dans cette canicule… Si on ne veut pas qu’elle soit terrible pour els rivières (enfin plus qu’elle ne l’est déjà), il va vite falloir un radoucissement et de la pluie…
Personnellement, j’ai arrêté mes sorties mouche vu l’état des rivières de Haute-Savoie… Il n’y a que l’Arve qui profite de la fonte des glaciers…
Apres lecture, aucune de ces publications ne donne d’éléments probants sur la thermosensibilité de l’ombre commun. Au contraire, Persat (1977) :
PS : je n’ai pas pu acceder a Persat 1996 néanmoins (paywall).
Sur la Dordogne. Le régime thermique est parfaitement connu car il y a des thermographes automatiques a Carennac (zone a barbeau supérieure) et a Cenac (zone a barbeau inférieure). A Carennac on est déjà limite-limite avec des températures journalières >20°C tout les étés, sur des séries longues (> 1 semaine) et ponctuellement des pics tres élevés au delà de 23°C. A Cenac c’est pire, il y a 2 ou 3 degrés de plus et des pics >25°C. Sur le papier, ces stations ne devraient pas abriter de belles populations d’ombre commun, bien structurées. Et pourtant… Ce qui se passe sur la Dordogne devrait sérieusement intéresser les scientifiques !
La dordogne est profonde aussi et ça ne sera jamais comme une autre rivière!!!
Dans les fosses les écoulement de " l’eau froide" maintien des truites en activité, vu et vérifié sur une truite de 60+ en pleine journée elle nymphé à 4 moment différents alors qu’il n’y avait vraiment aucune activité en surface…
Normal au mois d’aout sur la dordogne l’eau devait être à 24 degrés mais dans cette fosse de 3.5 m de fond la truite ne dépassais jamais les 50 premiers cms du fond donc devait y avoir une sacrée différence de température!
Je l’ai regardé sans savoir avec quoi poser une nymphe dans ce courant et aussi profond…depuis j’ai des nymphes double bille quand même!
Pour une fois, les analyses scientifiques et les constats des pêcheurs semblent se rejoindre. Tant mieux car c’est beaucoup mieux que l’étalage de nos divisions! Ces zones ponctuelles qui restent bien peuplées sont donc appelées “zones de refuge”. Soit!
C’est dommage, et c’est un peu ce que je me suis dis que ça devait être les derniers géniteurs!!!
Pour ce qui est de l’hypervue marseillaise c’est à cause d’une zone boisée au dessus de l’eau donc ombrage et zone de calme régulière sur plus de 20 m sans vagues du coup ce coup là c’était pas de la sur-tchatche!
Et puis je pêchais le barbeau au feeder 15 /30 m en aval alors j’avais vraiment que ça à faire de la journée d’observer la grosse truite qui sortait de dessous ma berge de temps en temps!